
Ancien membre de l’ASMAV: portrait
S’engager à l’ASMAV : dans quel intérêt ? Comment trouver le temps ? Faut-il s’y connaître ? Quel risque pour ma carrière ? …Toutes ces questions habituelles et légitimes apparaissent lorsque l’on réfléchit à la possibilité de s’investir dans l’ASMAV. Nous vous proposons des pistes de réponses à travers des interviews d’anciens membres actifs de l’ASMAV.
Retour sur le portrait du Dr Kim De Heller, ancien vice-président de l’ASMAV.
Peux-tu faire un résumé de ton parcours professionnel et personnel ?Je n’aurais jamais pensé faire médecine…. Après 6 mois de « découvertes » à HEC St-Gall, des voyages, 2 ans à « transports Handicaps » , une formation en cours d’emploi à l’EESP (Ecole d’études sociales et pédagogiques) puis un travail comme animateur social dans un EMS en psychogériatrie, les circonstances m’ont fait (enfin ?) réfléchir à mon avenir. A 24 ans, sur suggestion d’une amie, je m’inscris en fac de médecine à Lausanne… retour sur les bancs d’uni après 5 ans d’autonomie, une épreuve ! Mais la motivation donne la force de surmonter beaucoup de choses. Mon souhait était de devenir médecin de village, des gens, de la communauté ! En 1996, diplôme obtenu, début de l’assistanat en périphérie. Je me souviens que mes patrons m’avaient proposé de faire un remplacement de 6 mois dans leur service tout en faisant les gardes où, seuls, on gérait les urgences et l’hôpital. Petit calcul : Avec un salaire de médecin assistant et le nombre d’heures qu’on faisait…. j’arrivais à un salaire de moins de 14.- CHF/heure… pour un médecin! Et je payais ma femme de ménage 20.- CHF/heure. A ce moment est né le début de ma réflexion : il y a un « bug », comment faire changer les choses !Je termine mon assistanat en périphérie, suite à quoi PMU, DMI, CDC en périphérie et retour comme CDC à la PMU. Et enfin en 2004 installations dans un cabinet de groupe à Lausanne avec une patientèle fidèle qui me rends beaucoup. Quand t’es-tu engagé dans le comité de l’ASMAV et quels postes occupais-tu ?Avant l’ASMAV, je faisais partie de l’AEML, notamment dans la commission concernant les études de médecine. J’ai vite été membre de l’ASMAV dès mon retour sur Lausanne, c’est à l’époque le Dr Matter, ancien Président, qui m’a empêché de m’y échapper !! Il commençait déjà la réflexion avec l’ASAMC sur la loi sur le travail pour les médecins assistants. Objet qui semblait hors réalité à l’époque. « Mon Dieu, soyez déjà heureux qu’on vous forme, alors bossez et taisez-vous ! » étaient les phrases usuelles. Il n’y avait pas de limite d’heures. Puis, a débuté « la grande Guerre » ; réflexion, négociation, information, combat, menaces, grève, médias, défilés, manifestations, pour finalement arriver à une convention entre l’Etat de Vaud, les hospices, la FHV et les médecins permettant l’introduction de la loi sur le travail, en 2003. Nous étions un comité soudé de 8 à 10 personnes, avec une avocate engagée (Me Novier). J’étais un des deux vice-présidents. Après ce dur combat l’ASMAV a faibli, épuisée. Chacun d’entre nous qui avions sacrifiés nos projets à ce combat particulier se sont remis sur leurs routes. En 2004, l’arrivée du Dr Wilson l’a remise sur les rails.Pourquoi t’es-tu engagé dans le comité de l’ASMAV ?Faire partie de l’ASMAV, c’est participer à l’amélioration de la condition de notre statut, fonction, rôle et cadre. Mon expérience de salaire horaire mentionnée au début y a probablement été un des moteurs. Mais râler dans mon coin sur des défauts de ma fonction n’aide pas, hormis augmenter une frustration éventuelle. Par contre, participer à la réflexion au sein d’une structure qui peut être entendue permet de défendre activement ses opinions. Faire bouger et avancer les choses de manière constructive. La preuve en a d’ailleurs été là avec la signature de la convention cadre ayant abouti à la situation actuelle, meilleures conditions, salaire digne et maintien de la qualité de la formation. Sans l’ASMAV cela n’aurait pas été possible, il était donc logique de s’y engager !Quelles sont les actions de l’ASMAV qui t’ont le plus marqué lors de ton implication dans le comité ?Indéniablement, toutes les négociations et réflexions puis, la mise en application de la Loi sur le travail des MA. Autant au sein des hôpitaux avec les cadres des services, puis avec l’administration, et finalement avec les Politiques et l’Etat. Toutes ces étapes sont à chaque fois une découverte des soucis et craintes des « autres », les partenaires, pour qui il faut chaque fois trouver une solution afin qu’ils acceptent de bouger avec nous. Les négociations avec les conseillers d’Etat jusqu’à tard dans la nuit, quitter la table de négociation en tapant du poing, pour se faire rappeler avec un petit acquis de plus. Parler au TJ pour essayer de convaincre la population du bienfondé de notre action et garder les gens avec nous lors de notre grève des crayons. Réfléchir sur les stratégies à prendre et les communiquer dans des auditoires et parfois dans la rue ! Finalement la grève des crayons… Un bras de fer mémorable. C’était du 24/24H. Puis, trouver des solutions acceptables pour tous. Un juste milieu. Jusqu’aux signatures de la convention. Apprendre et découvrir les soucis des autres partenaires, leurs problèmes, leurs freins, passionnant !Qu’as-tu appris de ton implication dans l’ASMAV ?Nos soucis sont aussi souvent les soucis des autres. Mais pour avancer, il faut faire avec les freins et les forces des autres. L’art du compromis. Beaucoup de collègues merveilleux avec des facettes méconnues qui les honorent. J’ai aussi appris à mieux connaitre cette grande institution que sont les hospices et son implication avec l’Etat. Qu’avec conviction et solidarité on peut soulever des montagnes. Trouver les justes vitesses. La patience et la persévérance.Est-ce que ton implication dans l’ASMAV a modifié tes projets de carrière ?Cela m’a plutôt aidé à prendre des décisions après avoir pu explorer plus intensément les mécanismes autour de la santé, les implications de corporations qui m’étaient abstraites, les limites des structures environnantes. Impliqué activement dans un mouvement qui a bouleversé un équilibre, changé les acquis, a forcément créé des frustrations, donc quelques animosités. C’est vrai que la veille de ma nomination comme médecin associé en 2004, on est venu m’informer qu’un véto institutionnel, jamais avoué, refusait ma nomination. Cela a été probablement le prix à payer de mon implication engagée. Mais dans le fond cela m’a grandi et renforcé dans mes convictions. Je ne regrette rien, au contraire, ce fut une merveilleuse expérience qui m’a procuré de nombreux soutiens ailleurs et probablement poussé bien plus en avant. Je me souviens d’une phrase dans les corridors du Prof Darioli qui me dit « dans votre combat actuel, vous vous ramasserez quelques coups tordus, mais vous aurez beaucoup appris et progressé au final ». C’était vrai. Et cela m’a aidé à m’installer comme indépendant, tout en gardant un pied dans l’institution, et par la suite continuer à défendre mes idées et ma profession dans la SVM.Avec les horaires de médecin assistant (et une famille), comment trouver du temps pour participer à des activités extra-professionnelles?C’était plus difficile avec les horaires d’avant sans la LTr, mais comme CDC et avec un patron soutenant, dans la discussion, on arrive à trouver du temps. Merci à eux. Ma famille n’a jamais été délaissée, mes enfants furent une ressource pour vouloir arriver à de meilleures conditions permettant finalement de les voir plus. Il était également important pour moi que mes futures collègues puissent avoir une vie de famille décente. Il faut s’organiser, faire quelques concessions, mettre des limites. C’est aussi un apprentissage.Pourquoi est-ce important de s’engager dans l’ASMAV selon toi ?Pour maintenir ses acquis il faut en faire partie. C’est la défense de notre corporation. Nous faisons partie d’une profession impliquée dans la société. On ne vit pas en autarcie. On doit tous apporter une pierre, aussi petite soit-elle, à la corporation. Et si on souhaite des changements… c’est la seule solution pour avancer. L’union fait la force, chacun apporte ses compétences et son savoir pour trouver des solutions. Sans l’ASMAV, nous n’en serions pas où nous sommes aujourd’hui !Si tu devais recommencer, referais-tu partie du comité de l’ASMAV?Oui, sans hésiter. Une merveilleuse expérience de vie et connaissance de l’environnement et des structures nous entourant. Que des découvertes. Que du progrès. Continuez le travail, impliquez-vous, défendez vos idéaux et intérêts pour votre profession et le bien de tous.