1. Dans les rapports de travail, l’employeur a une obligation générale de protéger et respecter la personnalité de ses employé.e.s et de prendre toutes les mesures possibles pour y parvenir. Cette obligation découle notamment des articles 328 du Code des obligations (CO), 6 de la loi sur le travail (LTr) et 4 de la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes (LEg) pour ce qui concerne plus spécifiquement le harcèlement sexuel. Cette obligation s’applique pleinement dans le cadre des rapports de travail des médecins assistant.e.s et chef.fe.s de clinique.
2. Lorsque l’on évoque la protection de la personnalité, cela concerne essentiellement la protection de :
– l’intégrité physique,
– la santé psychique,
– l’intégrité morale (intégrité sexuelle),
– la considération sociale (réputation),
– les libertés individuelles (personnelle, syndicale, d’association, etc.),
– la sphère privée.
3. Les atteintes aux droits de la personnalité qui sont régulièrement reconnues par la loi ou la jurisprudence sont notamment :
– le harcèlement psychologique/mobbing ;
– le harcèlement sexuel ;
– la violation des normes de protection (horaire, repos, etc.) ;
– un conflit interpersonnel mal géré ;
– un contrôle excessif ;
– une violation du droit d’être occupé ;
– la discrimination ;
– …
4. L’obligation de protection vise les actes non seulement de l’employeur lui-même mais également des personnes qui y travaillent (supérieurs hiérarchiques, collègues), voire des tiers soit par exemple les patients d’un hôpital. Autrement dit, l’employeur a l’obligation de faire en sorte que la personnalité et la santé de ses employé.e.s soient protégées à l’égard de toutes ces personnes et doit prendre les mesures idoines pour y parvenir. Lorsque l’employeur manque à son obligation, il peut être rendu responsable d’un préjudicie subi par l’employé.e, même s’il n’en est pas directement l’auteur.
5. Concrètement, les mesures que doit prendre l’employeur pour respecter son obligation de protection sont les suivantes :
– mesures de prévention,
– émission de directives en la matière,
– mise à disposition d’une personne de confiance, externe à l’établissement,
– gestion des situations litigieuses (enquête, médiation, etc.),
– protection de la personne qui se sent victime,
– éventuelle sanction contre l’auteur.e.
6. Lorsque l’on parle plus spécifiquement de mobbing ou harcèlement psychologique, l’on entend un enchaînement de propos et/ou d’agissements hostiles répétés fréquemment pendant une période assez longue par lesquels une ou plusieurs personnes cherchent à isoler, à marginaliser, voire à exclure une personne sur son lieu de travail. Il peut s’agir d’empêcher la victime de s’exprimer, l’isoler, la déconsidérer auprès de ses collègues, la discréditer dans son travail, interrompre une conversation lorsque la victime apparaît, se détourner de la personne, ou encore confier des tâches ingrates. Le mobbing peut être le fait d’une ou plusieurs personnes. Il peut être « horizontal », soit le fait de collègues de même niveau hiérarchique, « vertical descendant », soit le fait d’un.e supérieur.e hiérarchique, ou encore « vertical ascendant », soit le fait de subordonné.e(s) à l’égard d’un.e supérieur.e.
7. L’interdiction du harcèlement sexuel figure quant à elle à l’article 4 de la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes (LEg), qui vise non seulement la problématique du harcèlement sexuel au sens strict, mais également celle de la discrimination fondée sur le sexe. Selon cette disposition, par comportement discriminatoire, on entend tout comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l’appartenance sexuelle qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d’imposer des contraintes ou d’exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d’obtenir d’elle des faveurs de nature sexuelle. Le harcèlement sexuel suppose ainsi un comportement à caractère sexuel fondé sur l’appartenance à un sexe, qui n’est pas souhaité par une personne et qui porte atteinte à la dignité. A titre d’exemples, le harcèlement sexuel peut prendre les formes suivantes :
– agression sexuelle, contrainte sexuelle, tentative de viol/viol;
– tentative d’approche accompagnée de promesses, de récompenses ou de menaces de représailles ;
– contacts physiques non désirés ;
– invitation importune dans un but sexuel ;
– présentation de matériel pornographique ;
– remarques sexistes ou plaisanteries grivoises ;
– remarques scabreuses sur l’apparence physique.
Le harcèlement sexuel peut avoir pour cadre soit le travail, soit des manifestations organisées par l’employeur. Il peut être le fait de collègues de travail ayant ou non une fonction hiérarchique ou de patient.e.s.
Lorsque des actes de harcèlement sexuel se révèlent sur le lieu de travail, c’est l’employeur qui en répond juridiquement, à moins qu’il démontre avoir pris toutes les mesures pour les éviter. En tous les cas, l’employeur peut être condamné à verser une indemnité à la travailleuse ou au travailleur concerné, laquelle peut aller jusqu’à six mois du salaire moyen suisse, plus un éventuel dommage supplémentaire.
En plus d’une action à l’encontre de l’auteur.e des actes qui peut être le cas échéant condamné au pénal et/ou au civil conjointement à l’employeur.
8. Lorsque le/la médecin assistant.e se sent victime de la part de collègues et/ou de supérieur.e.s d’agissements qui sont selon lui de nature harcelante ou qui le mettent dans une situation difficile, l’on peut en tous les cas recommander les actions suivantes :
– intervention auprès de l’auteur.e ;
– intervention auprès de la hiérarchie ;
– intervention auprès de l’employeur (direction des ressources humaines ou direction générale de l’hôpital) ;
– intervention auprès d’une entité désignée par l’employeur en vue de faire la lumière sur des actes de harcèlement ;
– le cas échéant action en justice pour faire en sorte que les droits soient respectés.
Pour tout conseil en la matière ou toute démarche en lien avec ces situations, l’ASMAV est bien sûr disposition:
avocat@asmav.ch